connaissance de soi

Publié le 2 Juin 2017

La nature humaine : la sensibilité

La question de la sensibilité finit tôt ou tard par se poser à tout aspirant spirituel. Par expérience, j'ai constaté que c'est une question qui soulève souvent beaucoup de passion et de difficultés. Dans la grande majorité des cas, on ne sait bien souvent pas quoi en faire et quelle relation établir avec cet aspect de notre développement. 

Commençons par nous assurer que nous comprenons bien de quoi il s'agit. La sensibilité, c'est une disposition de l'esprit à percevoir le monde, et je prends le monde dans son acception aussi bien extérieure qu'intérieure. L'esprit est l'outil de perception par excellence. Il passe par les cinq sens pour les perceptions dites grossières, mais il permet aussi de prendre contact avec des dimensions subtiles extérieures aussi bien qu'intérieures. Chaque sens grossier (vue, ouïe, odorat, toucher, goût) a son équivalent dans le subtil. Ainsi, avec la vue subtile par exemple, nous pouvons voir comment les énergies sont mises en mouvement, leurs couleurs, les entités, l'aura,... Et il faut bien comprendre que l'objet que l'on perçoit avec un sens subtil dispose également de qualités que l'on peut percevoir par les autres sens subtils. Par exemple, si l'on voit une énergie quelconque, on peut également la respirer, la goûter, la toucher et l'entendre...encore faut-il que ces sens soient également développés. Je pourrais donner de multiples autres exemples.

Ici se posent alors au moins deux questions : comment développer ces sens ? Et quelle place donner à ces perceptions ?

Avant d'aller plus loin, je vous invite d'abord à vous poser ces questions en relation avec le monde dans lequel vous évoluez au quotidien : que percevez-vous de votre monde ? de vos relations (conjoint, enfants, amis, environnement, ...) ? Prenez un instant et portez votre attention sur vos différents organes des sens. Quel pourcentage de ce qu'il y a à percevoir aux alentours vous semble-t-il percevoir, à votre avis ? Etes-vous en contact avec le chant des oiseaux ? les sensations de vos habits sur le corps ? l'odeur du repas dans la cuisine ? la présence des enfants dans la chambre ? la musique au loin ? etc Prenez ce moment et portez votre attention en parcourant chaque sens, chaque objet autour de vous, chaque personne présente avec vous maintenant. Regardez-les, touchez-les, respirez-les, écoutez-les, embrassez tendrement et avec respect les êtres chers qui sont autour de vous et d'une certaine façon goûtez-les. A chaque fois que vous faites cet exercice, essayez de percevoir de nouvelles choses, ce qui a changé depuis la dernière fois que vous avez fait cette expérience.

Pour percevoir correctement, cela demande de mettre en oeuvre plusieurs éléments. D'abord le silence mental. Si vous êtes dans vos pensées, vous pensez, et vous ne percevez pas. Pour percevoir et donc développer sa sensibilité, il est impératif de sortir du brouhaha mental et d'être présent à soi-même. Pour cela, le plus simple est de se centrer sur la respiration, sans la modifier. Ensuite, posez votre attention lentement vers un objet puis touchez-le avec votre main droite. Ressentez le contact. Prenez le temps. Découvrez les sensations comme si c'était la première fois.

Vous allez vous apercevoir que ça demande un peu d'énergie, surtout lorsque l'on porte consciemment son attention sur un sens, pour ne pas se laisser perturber par le reste. Ensuite ça demande de prendre conscience du sens en question et de l'objet. Peut-être n'aviez-vous pas remarqué cette aspérité ici ou cette couleur là ? Peut-être allez-vous découvrir une odeur nouvelle ? Peu importe. Il est nécessaire que les organes fonctionnent correctement. Si un rhume vous engorge, le goût et l'odorat vont être perturbés et vos sensations sont s'affaiblir. Si votre système nerveux est occupé par des tensions, votre qualité de perception va également s'amoindrir. On voit là comment également il est nécessaire de disposer d'une certaine détente, d'un relâchement, ce qui permet de mobiliser une plus grande énergie pour les perceptions.

Ensuite nous rentrons dans quelque chose de plus difficile à appréhender, c'est que la perception ne soit pas teintée d'un avis personnel, d'une ressouvenance, ou d'une réaction impulsive d'attirance ou de dégoût. En effet, il faut bien faire la distinction entre la perception elle-même et ce qu'elle implique en nous. Il nous faut du discernement à la fois dans les multiples perceptions qui nous arrivent aussi bien que dans les stimulations qu'elles provoquent. Et pour développer notre sensibilité, nous devons accepter et accueillir ce qui arrive comme ça arrive. Souvent, on ne veut pas voir telle ou telle chose. On s'anesthésie face à des perceptions qui bouleversent notre équilibre intérieur ou nos habitudes. Notre mode de vie pressé nous empêche de prendre le temps d'être complètement présent et attentif. Parce que nous avons élevé le mental au rang du "suprême gouverneur de notre vie", nous réfléchissons, philosophons, pensons, et nous ressentons de moins en moins.  Alors il nous faut des stimulations plus fortes, plus de bruit, plus de sucre ou de sel, davantage de monde autour de nous, plus de choses "extra ordinaires" pour nous sentir vivant. Dans ce mode de fonctionnement hélas répandu, plutôt que de s'ouvrir sur d'autres réalités, le réel se resserre jusqu'à ne plus être qu'une idée de ce qu'il est. Avec le temps, l'esprit et le corps s'émoussent. Nous disposons de moins d'énergie, nous nous alourdissons d'expériences incomplètement vécues qui nous empêchent d'être présent à ce qui est, aussi bien extérieurement qu'intérieurement. 

Je n'ai évoqué jusqu'à présent que les sens qui nous permettent de prendre contact avec l'extérieur. Les maîtres mots d'une bonne sensibilité sont donc : attention, détente, conscience, discernement. C'est également vrai avec les perceptions subtiles que nous allons voir plus loin. Mais nous avons également d'autres fonctionnements en action lorsqu'ils s'agit de percevoir ce qui se passe à l'intérieur de soi. Je ne parle pas de nos organes corporels, nos viscères, nos os, le coeur,... du moins, pas tout de suite. Le manque de présence à son corps nous emmène forcément vers la pathologie, car si on n'arrive pas à percevoir un dysfonctionnement léger en soi dès son émergence, il est certain que celui-ci s'amplifiera et deviendra une maladie plus ou moins grave à terme. Mais pour percevoir ce qui se passe dans notre corps, il nous faut développer autre chose, et nous être débarrassé de nombreuses autres barrières.

Evoquons un instant notre capacité à percevoir les émotions et les désirs. Ceux-ci ne sont pas des objets des sens tels que je les ai décrits au-dessus. Ils sont d'une autre nature, une nature énergétique. Souvent, nous ne les percevons que lorsqu'une émotion ou un désir est prêt à s'extérioriser, lorsque nous ne les réprimons pas. Le plupart du temps, ils sont teintés d'états de conscience du moment, voire intellectualisés et enfermés dans des pensées. En étant juste dans la perception, nous permettons à ces énergies de se libérer. Et plus nous allons être attentifs, plus nous allons pouvoir remonter à leur source et défaire les noeuds qui peuvent s'y trouver. De la même manière que ce qui a été décrit sur les perceptions extérieures, penchez-vous sur vos émotions : colère, joie, peine, tristesse, bien-être,... et sur vos désirs. Distinguez entre l'énergie elle-même et l'objet qui est le stimulant de l'émotion ou du désir, ou alors sur l'objet sur lequel une émotion ou un désir se projettent. Vous allez voir que c'est un peu plus difficile que le travail sur les objets extérieurs. Car il faut un discernement un peu plus fin, pour percevoir ce qui se joue à travers cette émotion ou ce désir. Car d'une façon générale, et sans rentrer dans le détail, l'esprit est lourd non seulement de croyances, d'expériences  non intégrées ou d'idées préconçues, mais aussi d'émotions et de désirs cristallisés. Et il n'y a que dans la perception que l'on peut avoir une chance de s'en libérer et non dans l'analyse. Pourquoi ? Parce que par la perception, la perception consciente j'entends, nous allons mobiliser l'énergie de l'esprit dans une direction donnée. En concentrant cette énergie sur un objet, ici une émotion, nous allons à la fois débloquer les barrières que nous avons pu mettre, puis par la libération de l'énergie émotionnelle qui s'ensuivra, nous allons voir et comprendre le fonctionnement qui tournait autour de cette émotion refoulée. C'est ainsi que fonctionne la connaissance de soi et l'intégration du moi. J'ai déjà expliqué cela par ailleurs.

Puis au fur et à mesure, le processus de perception, quand il est compris et intégré, devient naturel et se génère lui-même. Il libère de plus en plus l'énergie de l'esprit. Il n'y a que par la perception que l'on peut déconstruire le moi. Et il n'y a qu'à travers la perception que l'esprit peut se dégager et ainsi découvrir son infinie plasticité et d'autres possibilités. Car l'esprit permet bien davantage que simplement percevoir par les sens. Sauf qu'en attendant, nous ne disposons au départ que peu de latitude.

Allons maintenant un peu plus loin avec les sens subtils. La condition de base est déjà d'avoir mis en pratique les quelques exercices proposés ci-dessus. Si nous ne percevons qu'une part infime du monde extérieur, ou seulement à travers nos filtres, si nous sommes cristallisés dans nos pensées et nos croyances, ou si nous sommes en mauvaise santé, pollué par des produits chimiques et que nous ne prenons pas soin du corps, si nous sommes stressés et soumis à des tas de problèmes psychologiques, ce n'est pas la peine d'aller plus loin. En un mot, si nous avons trop à faire avec soi ou que nous chargeons le corps et l'esprit de produits lourds, il n'est pas utile de chercher à percevoir des éléments plus subtils du réel, ça ne peut que nous déstabiliser davantage. Les personnes qui se droguent et qui ont des hallucinations se droguent davantage pour éviter ces perceptions qu'ils ne contrôlent pas et qui souvent ne leur montrent que des choses obscures, d'ailleurs issues de leur propre conscience. Certaines personnes ayant subies des souffrances intolérables sont également dans ce cas. Au passage, la drogue ne donne pas plus d'énergie à l'esprit. Elle ouvre des portes dans lesquelles l'esprit peut s'engouffrer...jusqu'à parfois ne plus pouvoir réintégrer le corps. Dans ces cas-là, celui-ci passe sous le contrôle d'entités, et alors on arrive à ce que l'occident appelle la psychiatrie. Je n'irai pas plus loin.

Certaines personnes vivent des expériences intérieures fortes, comme par exemple un éveil subi de kundalini ou un éveil de la particule divine. Ce qui est intéressant avec la kundalini, c'est qu'elle permet justement de désincruster l'esprit de ses engorgements et ainsi permet de développer très vite une certaine sensibilité. Mais il y a un revers à cela, c'est que la faculté de discernement doit s'acquérir dans des temps très rapides, au risque de se faire embarquer dans des expériences dont on peut avoir du mal à se remettre. Le corps doit être en bonne santé. Le psychisme doit être équilibré. L'activation doit être naturelle et pas forcée. Alors elle peut autoriser un développement sain et ouvrir à une sensibilité subtile qui nous montre le réel dans des dimensions subtiles inaccessibles par ailleurs, avec ses beautés, mais aussi avec ses laideurs. Car lorsque la sensibilité subtile s'ouvre et se développe, il faut être prêt à tout percevoir, absolument tout. 

Beaucoup de monde se fait initier au Reiki et découvre ainsi un éventail de perceptions jusqu'alors inconnues. Il est vrai que le Reiki est un bon moyen de développer sa sensibilité, du moins jusqu'à un certain niveau. Le problème là encore n'est pas la sensibilité mais le discernement. Ce n'est pas parce que l'on perçoit quelque mouvement d'énergie que l'on sait tout de ce qui se passe dans les mondes subtils par derrière. Et ici, c'est d'abord l'humilité qu'il faut développer. Car l'ego a vite fait de se raconter des histoires et de jouer à l'apprenti sorcier. Car l'esprit peut aussi se créer ses propres perceptions en se coupant du réel.
Outre le Reiki, tous les processus divins amènent à sa façon à développer la sensibilité subtile. Certains vont éclairer l'esprit, d'autres vont éveiller l'âme, certains vont passer par le corps ou la conscience. La Lumière divine dont je parle dans ce blog prend tous les aspects de l'humain en charge, et va amener à développer la sensibilité dans toutes les directions possibles, et donc amène à des découvertes de plus en plus profondes à la fois sur soi et sur le monde. Il faut parfois s'accrocher car comme je le disais, tout n'est pas rose, loin de là.

A ce stade, je pense avoir fait un tour rapide du développement de la sensibilité. Maintenant, que faire de celle-ci ? Car très souvent, lorsque l'on est sur un chemin spirituel, il peut arriver que des portes s'ouvrent et que nous ayons accès à d'autres dimensions, d'autres plans, d'autres êtres, d'autres énergies, d'autres temps... Cela peut devenir compliqué à gérer, et si nous sommes attachés à ce genre de perceptions, nous pouvons créer un ego subtil qui va s'enorgueillir de ces possibilités. Je le répète donc, c'est d'abord l'humilité qu'il faut cultiver. A l'inverse, renier ces perceptions, c'est se couper de soi-même et se fermer des portes. 

Ensuite faut-il en parler ? Si vous vous adressez à quelqu'un qui n'est jamais passé par là, soit vous allez créer de la jalousie, ce qui est très fréquent dans les groupes spirituels lorsque l'un des membres se distingue par une sensibilité plus fine, soit vous risquez de ne pas recevoir la compréhension que vous recherchez peut-être à travers la communication. Les spiritualités orientales conseillent soit de ne pas gaspiller l'expérience en en parlant, soit il n'y a qu'au "maître" que l'on peut en parler.Et c'est vrai qu'au début, ou dans le cas d'expériences fortes, il nous est nécessaire d'en parler. Avec le temps et l'expérience, ça peut ne plus être nécessaire, mais au moins pour apprendre sur le sujet, ne serait-ce que pour savoir ce qui se joue et pour éviter les fausses interprétations, j'estime qu'il est important de pouvoir les partager. Mais là où ça devient délicat, c'est que décrire une perception n'est pas simple (décrivez le goût de la fraise à quelqu'un qui n'en a jamais mangé), et il y a une infinité de possibilités. Et dans cet océan de perceptions, certaines nous sont propres, donc par essence impossibles à partager.

Il est clair que face à cela, le moi commence par être perdu, puis ensuite il s'en habille, peut en jouer, se dissimuler derrière, être lui-même l'objet et le sujet,... Si je peux donner quelques conseils, je dirais qu'il ne faut pas hésiter à explorer, à approfondir, car je le rappelle, la sensibilité crée la conscience et brise les limites. Ceci s'apprend. Puis ensuite apprendre à s'en détacher pour laisser le champ libre à plus vaste, plus large, plus profond, plus fin,... La sensibilité n'a pas de limite, comme la conscience. Enfin, ne pas hésiter à s'ouvrir, à accueillir, même si ce n'est pas forcément agréable au premier abord. Le réel contient un nombre absolument incroyable et inimaginable de choses que l'éternité ne suffira peut-être pas à explorer. Et la foi, celle qui est au-delà de tout jugement et de toute croyance se fortifie aussi par les perceptions, lorsque les choses de Dieu se révèlent à nous. En conclusion, il n'y a aucun problème à ce que la sensibilité se développe, et je dirais même que c'est une nécessité. Si l'humain pouvait percevoir avec tous ses sens éveillés les impacts de ses gestes, de ses pensées, de ses intentions sur le monde et sur les autres, il est certain que le monde serait différent. La difficulté, et c'est encore plus vrai tant que l'on un ego, c'est de donner la juste place à cette sensibilité dans notre développement, puisqu'elle est une part non négligeable de celui-ci.

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Rédigé par Serge Z.

Publié dans #connaissance de soi

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