Publié le 16 Août 2014

Ce que Dieu attend de nous

Pour illustrer le titre de l'article, je vais prendre appui sur une situation qui s'est produite l'année dernière dans le cadre professionnel. De là, je décrirai comment l'on peut mettre en oeuvre un comportement qui s'aligne sur une démarche spirituelle et évolutive dans une situation du quotidien. En effet, il y a deux possibilités pour entamer un travail intérieur : soit on cherche à reposer dans un monde où la souffrance ne nous atteindrait plus, ce qui revient à dire que l'on cherche une échappatoire à ce monde, soit au contraire on cherche à dépasser l'humain en nous pour oeuvrer à sa transcendance, et en cela, on travaille à une démarche évolutive. Selon le cas, l'attitude que l'on aura face à l'existence ne sera pas forcément la même. Illustration par cette situation.

Dans le cadre de mon activité professionnelle, j'ai l'occasion de piloter des équipes d'une vingtaine de personnes chez des clients. Une nouvelle strate de managers est arrivée et a considéré que la prestation que je pilotais à cette époque ne répondait pas aux objectifs de rentabilité demandés (que je ne connaissais d'ailleurs pas et pour lesquels je n'avais pas les outils pour mesurer et gérer). Le nouveau manager m'a donc convoqué à une réunion avec toute l'équipe dirigeante (commerce, qualité, direction) et dès que je me suis installé, il a passé peut-être 15 minutes à m'invectiver avec une mauvaise foi sans commune mesure, en mettant en avant des arguments fallacieux et qui plus est, sans preuves. Très rapidement, j'ai compris qu'il voulait ma tête, si bien qu'à la fin de ce qui m'est vite apparu comme un dossier à charge, selon son propre avis, la seule conclusion qu'il attendait est que je donne ma démission et que je laisse la place à quelqu'un de plus compétent.

J'en avais donc pris plein la tête et personne autour de la table n'avait osé broncher ou lui faire remarquer que la plupart des éléments qu'il avait mis sur la table n'étaient en rien argumentés. De mon côté, j'avais bien essayé de le lui faire remarquer mais je n'avais pas le droit au chapitre. La colère montait en moi face à tant d'injustice, de mauvaise foi et d'agressivité. Tout le monde savait autour de cette table que je mets un point d'honneur à réaliser mes missions avec professionnalisme, et c'est d'aileurs pour cela que l'on m'avait confié la délicate mission sur laquelle j'étais positionné depuis 18 mois. Mais j'avais face à moi un décideur influent, qui venait d'arriver et qui se moquait bien de me chercher des circonstances atténuantes. Il fallait qu'il démontre la pertinence de ses actions, quels qu'en soient le prix et les conséquences; d'autres en avaient fait les frais avant moi.

Lorsque je suis en proie à une émotion, d'autant plus lorsqu'elle est violente, je m'efforce de ne pas y réagir. Je prends de grandes respirations, je me recentre, je laisse passer l'énergie et j'essaie de réfléchir le plus vite et le plus posément possible pour donner une réponse à la situation le plus dans l'axe possible de ce que je suis et des valeurs que je tente d'incarner. Ce que je viens de dire, c'est bien joli, mais je dois quand même avouer que la première des réactions que j'ai eues était de vouloir me lever et de lui coller ma main en travers de la figure ! Mais cela aurait été à l'opposé de mes valeurs.

J'essayais de regarder le visage de mon interlocuteur mais son regard était fuyant et un épais nuage noir (dans le subtil) entourait son visage. De mon côté, je ne sais pas de quelle couleur était mon aura mais elle ne devait pas être bien brillante non plus... Sauf que je me disciplinais pour me centrer sur la respiration, ce qui me permit tout de même de faire un peu de ménage dans mon champ subtil et d'éclaircir ma réflexion.

Que les choses soient claires : il serait facile de dire que je suis le "gentil" et que cette personne est le "méchant". Prendre cette situation (ou une autre) de façon aussi duelle est se considérer chacun dans son égo et ne résout rien, car peut-être que lui, dans sa perception des choses, se prenait pour le "justicier pour le bien de l'entreprise" face à un "incompétent qui nuit aux intérêts de tous", je ne sais pas. Tout ça pour dire qu'il avait peut-être une justification inébranlable à ce comportement. Là encore, je spécule, mais on ne connaît jamais toutes les motivations des personnes dans les situations que nous rencontrons au quotidien. Et on ne peut agir dessus ! On ne peut agir que sur soi. C'est la raison pour laquelle juger quelqu'un est une ineptie. Donc se fermer, et se refermer sur soi n'est jamais une solution viable à terme. Le mieux que l'on puisse faire, c'est de dépassionner le débat et de discuter sur des faits et dans la paix, et non sur des émotions ou des spéculations.

Après quelques instants de calme, je me suis dit qu'il fallait que je prenne cette situation par le coeur et qu'elle était un bon moyen de travailler sur moi en éprouvant la possibilité de retourner une situation négative en quelque chose d'autre. J'aurais pu partir de suite, d'ailleurs j'en avais envie. Mais face à cette "adversité", il me fallait trouver un comportement digne et positif qui allait ouvrir vers une solution ouverte pour les intérêts de chacun. D'un autre côté, j'avais certainement des choses à apprendre des éléments qui ont été évoqués pour progresser dans mon métier. J'ai donc repris chacun des arguments et des "problèmes" évoqués en proposant un plan d'actions que l'on écrirait ensemble, pour objectiver les avis, en soumettant à l'assemblée un prochain bilan à 6 mois. Il ne pouvait faire autrement que d'accepter, sinon il aurait été pris en flagrant délit d'obscurantisme forcené. Soit dit en passant, ce que je décris là n'a rien d'exceptionnel. Un cadre qui a un tant soit peu l'habitude de situations complexes a des outils pour appréhender et aplanir un conflit et je suppose facilement que quelqu'un d'expérimenté aurait fait de même. Etre en contact avec des personnes qui utilisent des stratagèmes d'intimidation, basés sur la mauvaise foi et l'incohérence n'a rien d'exceptionnel non plus en entreprise. Beaucoup de personnes sont très mal dans leur peau et pas à leur place dans cet environnement, qui devient d'ailleurs de plus en plus anxiogène. Mais là n'est pas le propos.

J'ai décrit cette situation somme toute assez banale pour montrer plusieurs choses, dont la principale est la suivante : l'intégration du soi, donc de l'ego, se travaille à chaque instant, dans quelque situation que ce soit. Il n'y a pas de meilleur moment que ici et maintenant pour y travailler. A chaque fois que notre attitude est fermée face à une situation ou que nous sommes en réaction, nous pouvons être certain que c'est parce que nous sommes retranché dans notre ego. La première des choses est de le reconnaître. La seconde est de se donner la possibilité de le voir plus tôt lorsque ceci se produira de nouveau. La troisième, c'est de se donner la possibilité de fonctionner autrement une prochaine fois. Car lorsque l'on comprend que l'ego est un retranchement, une coupure face à l'existence, on a déjà cerné une partie du problème. Je parle là de ce qui se passe à l'intérieur de soi, non du comportement que l'on montre aux autres. Car on peut apparaître tout à fait à l'aise et ouvert face à une situation et en être complètement fermé à l'intérieur. La seule chose qui compte est ce qui se passe à l'intérieur de soi, dans notre conscience, le reste est secondaire, même s'il est nécessaire d'apporter une réponse intelligente dès que nous le pouvons. Pour travailler en ce sens, la condition préalable est l'humilité. Nous avons toujours à apprendre et pouvons toujours progresser. On a toujours à apprendre les uns des autres, et la vérité peut se révéler même si l'on a face à soi quelqu'un qui ne sait pas l'exprimer et qui en sait peut-être moins que nous. L'orgueil crée la distance, l'humilité la brise et nous ouvre le coeur.

La réponse intelligente est celle qui fera grandir, qui apaisera les conflits, amènera la paix, ouvrira les consciences et les coeurs, amènera sagesse et harmonie. Au pire, elle n'envenimera pas une situation si celle-ci est déjà tendue et que nous ne savons pas y répondre. Mieux vaut alors ne rien faire et prendre sur soi le chaos environnant plutôt que de tenter une action superficielle qui risque d'amener plus de chaos et de confusion qu'elle n'amènera de résolutions. Tout ce qui nous ouvre à l'autre et à la vie fait grandir notre coeur et permet de dissoudre l'ego ; la bonté, la générosité, la gratitude sont parmi les qualités à développer pour ce faire. On parle beaucoup de l'amour dans la spiritualité, mais je ne suis pas certain que cette notion soit bien comprise et pour le coup, je suis tenté de la mettre de côté au profit des qualités déjà citées, mais aussi de la compassion, la bienveillance et de la charité, pour ne citer que celles-là. Pour la petite histoire, ce manager est revenu me voir de lui-même quelques temps plus tard, en essayant de m'expliquer pourquoi il avait eu un tel comportement et il voulait s'assurer que je ne garde pas une mauvaise image de lui. Je lui ai dit que je ne gardais aucune rancune, mais qu'il m'a fallu du temps pour lui pardonner, le pardon m'ayant permis de tourner la page et de continuer à avancer.

Tout le monde veut la paix dans le monde et l'amour fraternel entre les peuples. Qui ne s'indigne pas face à toutes les injustices dont on a connaissance ? Mais vouloir la paix dans le monde alors que dans notre quotidien, nous rendons coup pour coup, et qu'en nous il reste des traces de violence est le comble de l'hypocrisie. Une violence même mineure faite ici, et c'est une guerre qui se déclenche là-bas : c'est le fameux effet papillon. Car dans l'astral, les émotions et les réactions ne s'atténuent pas avec la distance, la distance n'existe pas. Au contraire, elles s'amplifient. Et de fil en aiguille, d'abord un individu, puis quelques individus et rapidement des groupes entiers finissent par sentir de la violence monter en eux, reste plus ensuite qu'à trouver un prétexte pour l'extérioriser. Nous avons donc une grande responsabilité les uns par rapport aux autres, nous considérer comme des individus séparés les uns des autres est de l'ignorance.

Autant nous avons un ego individuel, autant des individus fonctionnant ensemble créent un ego de groupe. Krishnamurti disait qu'à partir du moment où l'on se disait chrétien, musulman, communiste, nationaliste ou quoi que ce soit d'autre, nous étions déjà dans la violence. C'est une autre façon de dire que se séparer du reste du monde pour quelque raison que ce soit est s'en couper, et donc crée par le fait un ego de groupe. Il est intéressant de noter qu'un ego fonctionne sur une conscience non intégrée, un ego de groupe fonctionne sur un ensemble de consciences non intégrées que l'on appelle "égrégore". L'égrégore d'une entreprise, quand on le perçoit et pour ne parler que de celui-là, indique très vite quelle est "l'ambiance" interne, où se trouvent les problèmes et si on se sent en phase avec celui-ci, comment on y contribue ou pas... Fin de la digression.  Et donc un ego va vouloir exister, souvent au dépend des autres, et de cette façon, crée des conflits, puis des guerres. La revendication de l'ego pour lui-même est la suprême violence, car comme je l'ai écrit avant, l'ego est non amour. Le corollaire, c'est que l'amour est non ego.

Alors : qu'est-ce que Dieu attend de nous ? Eh bien Il attend que nous fassions ce travail d'intégration de soi et de développement des vertus, ou des qualités d'être, au jour le jour, dans notre quotidien, chacun à notre mesure, et ce pour construire notre âme, à travers laquelle Il pourra oeuvrer. Il attend que nous prenions conscience de notre unité, de notre responsabilité les uns envers les autres. Il attend que nous baissions la tête dans l'humilité et que nous nous rendions compte que chacun de nos petits gestes a une portée mondiale, universelle même. Il attend que nous ouvrions nos coeurs, et peu importe que l'on soit croyant ou non, car Dieu est avant tout une réalité existentielle qui s'exprime par le coeur, loin avant d'être un concept mental de religion. Ce que Dieu attend de nous, c'est que nous cessions d'être des "mi humain mi animal" répondant à nos pulsions et à nos instincts, pour être des "pleinement humains". De cette façon nous contribuons à un monde meilleur et nous pourrons être fiers d'en être les artisans. Dieu, et ses anges avec Lui, attendent que nous vivions par le coeur une spiritualité vraie à travers laquelle Son Oeuvre pourra se réaliser. Car telle est notre finalité.

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Publié dans #connaissance de soi

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